Parmi les milliers de données fuitées de l'équipe d'Emmanuel Macron figure le nom d’Alain Tourret. Prétendument partisan de la "moralisation de la vie publique", ce proche du président à réglé des achats personnels avec son enveloppe de député.
Télévision achetée chez Darty pour 4 974 euros, voyage en Israël financé à hauteur de 600 euros, participation à des vacances au Sénégal pour 300 euros ou encore parties de golf allant de 69 à 81 euros : ce sont quelques exemples des dépenses effectuées par Alain Tourret, investi par La République en marche (REM) dans le Calvados pour les législatives.
Dans une liste publiée par Mediapart le 23 mai, on découvre en effet une partie des emplettes réalisées par le député sortant (ex-Parti radical de gauche) entre 2012 et 2017.
Le problème, c’est que ces achats, il les a réglés avec l'IRFM, indemnité parlementaire de 5 373 euros nets par mois à laquelle ont droit les députés de l’Assemblée nationale pour couvrir les frais liés à leur mandat.
Interrogé le 24 mai par Le Figaro, Jean-Paul Delevoye, président de la Commission nationale d'investiture de La République en marche, a fait savoir qu'il n’envisageait pas pour l’instant de retirer son investiture au candidat.
source : Russia Today
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Comme des millions de Français, il arrive au député Alain Tourret de passer chez Darty. Le 1er avril 2013, il a même laissé 4 974 euros à la caisse. Mais à l’inverse de millions de Français, Alain Tourret n’a pas déboursé, ce jour-là, un centime de sa poche. Car cet élu du Calvados a tout réglé avec son IRFM, cette fameuse indemnité de 5 300 euros net par mois que les parlementaires touchent en plus de leur « salaire » pour couvrir des frais exclusivement liés à leur mandat.
D’après nos informations, cet élu proche d’Emmanuel Macron, investi par La République en marche (REM) aux législatives de juin prochain, a abusé de cette enveloppe de fonds publics à plusieurs reprises ces dernières années, non seulement pour acheter sa télévision mais aussi des tickets de cinéma, des parties de golf, ou encore lors de vacances au Club Med au Sénégal.
À la suite de nos découvertes et de nos questions, le député du Calvados s’est retourné en catastrophe, le 15 ou 16 mai dernier, vers le déontologue de l’Assemblée nationale pour prendre conseil et lui soumettre certaines dépenses litigieuses. Admettant plusieurs « erreurs d’imputation », Alain Tourret nous a fait savoir le 19 mai qu’il venait de rembourser plus de 16 000 euros, sans doute pour essayer d'éteindre l'incendie. Entamée sous contrainte journalistique, cette démarche tardive pourrait toutefois ne pas suffire. Alors que Mediapart a pu éplucher seulement onze mois de dépenses sur cinq années de législature (2012-2017), un examen élargi de son compte IRFM par les autorités semble désormais indispensable.
Ces informations, nous ne les avons pas volées mais tirées des Macron Leaks. Ancien radical de gauche (PRG), rallié à Emmanuel Macron dès 2016, Alain Tourret fait en effet partie des cinq personnes, qui ont vu leurs boîtes mails déversées en vrac sur Internet à deux jours du second tour. C'est là que Mediapart a déniché onze mois de relevés bancaires relatifs à son compte IRFM, répartis sur les années 2013, 2014 et 2016.
Censées rester confidentielles, ces pièces viennent démontrer, une fois de plus, l’urgence d’instaurer un contrôle sur cette indemnité représentant 66 millions d’euros de fonds publics par an, et régulièrement détournée à des fins privées – rappelons que les députés se contentent d’attester « sur l’honneur » qu’ils respectent les règles d’utilisation et que l’Assemblée fait confiance à ses troupes pour reverser, en toute spontanéité, le « surplus » d’IRFM non consommé en fin de législature.
En l’occurrence, que trouve-t-on dans ses archives ? Laissons de côté les retraits d’espèces (jusqu’à 2 600 euros tout de même en mai 2013), les frais d’autoroute, notes de bar et charcuteries, les repas parfois réglés dans des restaurants gastronomiques, les emplettes au magasin Printemps, etc. : l’exercice du mandat parlementaire exige de s’habiller, se déplacer, inviter. Sur le relevé de juin 2014, on s’arrête tout de même sur 400 euros de dépenses chez Hermès, boutique de luxe parisienne… « Des cravates ! », tranche Alain Tourret. Quant aux vins commandés sur Internet, « c’était pour recevoir dans le cadre de mon activité parlementaire ! », balaye ce dernier.
Il a également utilisé la réserve parlementaire pour le financement d'une télé de même que pour l’achat d’un fauteuil personnel. On bute également sur des places de cinéma à « l’UGC Mondeville », près de chez lui, à 19,20 euros la soirée. « Il s’agit de personnes que j’ai invitées comme parlementaire », se défend Alain Tourret. Des tête-à-tête ? « Je ne vais pas vous dire le film, je ne m’en rappelle pas ! », s’agace-t-il.
Des parties de golf sautent par ailleurs aux yeux : « 69 euros » par-ci, « 81 euros » par-là. « J’ai des golfs dans ma circonscription, je me bagarre pour eux, j’ai réussi à les sauver, réplique l’élu du Calvados, qui joue en été comme en hiver. À partir de là, qu’il y ait des liens qui se fassent entre le parlementaire et les responsables du golf… » Interrogé sur la prise en charge de ces activités, le déontologue de l’Assemblée n’en conteste pas le principe. Mais notons que le green préféré du député, le « Golf Omaha Beach », se trouve en fait dans la circonscription de sa voisine, l’écologiste Isabelle Attard. Surtout, son IRFM a servi plusieurs fois au « Golf des Abers » près de Brest, au « Golf de Buc » dans les Yvelines, ou bien en Provence pendant les vacances parlementaires. « Pour la Provence, c’est une erreur d’imputation », admet l’élu.
Sur les relevés consultés par Mediapart, il y a enfin des frais engagés à l’étranger. Juste après le réveillon de janvier 2013, quelque 300 euros ont été réglés au profit du Club Med du Sénégal et de l’hôtel « La Paillotte » en Casamance, situé « entre plages, forêts et mangroves ». Sans compter 140 euros de dépenses à l’aéroport d’Orly. « Je suis vice-président du groupe d’amitié France-Sénégal à l’Assemblée, avance Alain Tourret (également dans les instances des groupes Algérie, Canada, Italie, Japon, Madagascar, Maroc et Pologne). Je devais rencontrer des personnes, j’ai eu des tas d’entretiens. » Avec qui ? « Des responsables locaux de la communauté sénégalaise… » À « La Paillotte », c’étaient plutôt « des responsables politiques belges ».
En réalité, le député n’était pas du tout en mission pour l’Assemblée, mais en vacances avec son épouse. « J’ai concilié les deux, je ne vais pas vous dire le contraire », concède Alain Tourret, certifiant avoir payé les billets d’avion lui-même. Avec le recul, « je comprends que mes explications puissent interpeller », concède-t-il. « Il est certain qu’on peut estimer que c’était plus prudent [de payer avec des fonds personnels], plus opportun si vous voulez. »
En 2016, apparaît enfin un séjour en Israël, qui a coûté plus de 600 euros à l’Assemblée nationale. Pour ce voyage, Alain Tourret avait enfilé sa casquette de président de l’Institut international des droits de l’homme et de la paix, une association qu’il a lui-même fondée. Mais pourquoi diable l’institut n’a-t-il pas pris en charge lui-même ce déplacement sans rapport avec l’Assemblée ?
source : Mediapart
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